Comment l’École a raté ma fille. (Épisode 6)

Dernier épisode avant l’épilogue. Courage à mes lecteurs chéris.

La section européenne, à minima.

Les années lycées sont passées comme une lettre à la poste.

À la première réunion parent-prof, j’ai eu devant moi une collègue qui m’a parlé de compétences. J’ai failli lui sauter au cou.
Une autre qui m’a parlé des qualités humaines de ma fille. Pareil.
C’était la première année du lycée réformé et ça s’est plutôt bien déroulé.

À quelques détails près.

En fait de classe européenne, à part des cours d’histoire en anglais, il ne s’est pas passé grand chose. Ni échange, ni voyage, ni correspondance. Rien. Nada. Que dalle.
Nouvelle déception de ma linguiste en herbe, qui rêvait de voyages et de rencontres avec d’autres jeunes d’ailleurs.
J’ai passé trois ans à lui dire qu’elle pourrait faire un Erasmus plus tard. Elle s’est consolée en regardant en boucle l’Auberge Espagnole.

Merci quand même à son professeur de LV3 Italien qui lui a offert l’ouverture européenne dont elle rêvait.

Et le sport dans tout ça ?

Quel sport ? Aucun des collègues d’EPS n’a su adapter ses enseignement à une gamine à qui certains gestes (mais pas tous) étaient interdits. Interdite de sport scolaire par un généraliste intelligent, elle a galopé, nagé, couru toute l’année en toute liberté. Heureusement sinon, je crois qu’il aurait fallu que je l’attache !

La dernière ligne droite

L’année de Terminale. Forcément fatidique. Tous ceux qui l’ont vécue (en tant que parent) le savent.

Je vous avoue que c’était pas gagné d’avance.
Déçue par la philo, dégoûtée de la lecture depuis longtemps, déprimée par les langues et pas sauvée par les maths….

Dans ce lycée, les parents sont conviés au conseil de classe. Le constat a été relativement unanime : manque de travail, manque de régularité… En résumé manque de tout ce qu’il faut pour avoir le bac.

Ce jour là, je ne sais pas pourquoi, j’ai osé parler.
« J’entends votre constat. Maintenant, qu’est ce qu’on fait ? »

Et vous savez ce que m’a répondu l’équipe enseignante ?
Rien. Absolument rien. Un long silence. Très long. Trop long. Que le proviseur a brisé en répétant ma question et en regardant les collègues.
Qui se sont précipitamment répandus en évidence sur le mode : « il faut qu’elle se mette au travail ». Le seul qui a trouvé un truc intelligent à dire c’est le collègue de maths qui a proposé qu’elle lui apporte ses devoirs pour lui expliquer ses erreurs.

Malheureusement, je crois que c’était trop tard pour envisager une réconciliation avec le travail scolaire.

Le bout du tunnel.

Il y a un an, elle a eu son bac. Merci à son 20/20 en natation 🙂
Comme tous les parents, j’étais contente.
Ça voulait dire que plus jamais je n’irai m’asseoir devant quelqu’un qui me parlerait de ma fille comme d’une élève.

C’est ce jour là que j’ai eu l’idée de ces billets. Parce que j’ai été soulagée et que je me suis sentie enfin libre d’écrire tout ça.

Je ne sais pas ce qu’elle fera de sa vie, mais je pense que ce sera loin de l’école.
C’est dommage d’ailleurs parce que ses talents seraient précieuses à notre institution.

(Épilogue à suivre)

2 Commentaires

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2 réponses à “Comment l’École a raté ma fille. (Épisode 6)

  1. Votre constat est aussi le mien, en tant que maman mais aussi en tant qu’enseignante : un élève est trop souvent un visage que l’on va voir pendant un an en entrant dans sa classe et dont on ne va pas vraiment s’occuper mais, pardon, c’est ça l’école de l’hétérogénéité. personne n’a envie de se creuser la t^te pour savoir comment rendre les cours accessibles à tous et de reprendre en choeur : « et si … » . Aussi je soutiens fermement ceux qui sont parfois hors programme mais qui prennent le problème à bras le corps, ceux qui ne s’enferment pas dans un « c’est la faute du ministère ». La remise en question dans notre métier est la clé de tout.Il est dommage qu’au cours de sa scolarité votre fille n’ait pas rencontré un enseignant dont elle se souvienne pour tout cela et qui lui aurait redonné goût aux études.

  2. AUDREN de KERDREL Emmanuel

    Je connaissais la religion « réformé », mais le lycée, ça, jamais entendu parlé. Tiens mon aîné aussi a été dans une section Européenne, ce qui fut une catastrophe, d’ailleurs…
    Pour moi, c’était compliqué le lycée. Dans ma tête. J’étais ravi que mes fils y accèdent. Mais c’était un monde inconnu pour moi qui avais tout arrêté à la 3°. Il n’y a que les films de Diane KURUYS qui me faisaient rêver face à ces années-là. Comme je dis souvent, : moi, je n’ai jamais fait de Philo, ni les Maths qui concernent ces années-là, ni de dissert. Je me suis arrêté à la rédaction (moi qui passe ma vie à écrire… et à lire). D’où mes problèmes, j’imagine, pour réussir le sacro-saint concours de Professeur des Ecoles que j’ai raté tellement de fois. Sans oublier bien sur ce qui demeure un fantasme , « les années lycée », c’est à dire le rapport aux filles et aux garçons de cet âge-là. Et bien sur, elles m’ont cruellement manquées. Toujours en fait.
    J’étais loin, très loin même. Je faisais confiance à mon ex, j’ai perdu le fil peu à peu, tout en restant attentif. Ce que j’aimais c’est mes enfants venaient me voir et qu’ils me contaient leurs écoles respectives, qu’ils me montraient leurs livres. Mon aîné me récitait « Iphigénie » et j’étais émerveillé. Et puis… et puis…
    Le sport me semble une donnée essentielle de cet âge-là et du mien (quinqua). Les miens ont fait effectivement énormément de sport(s).

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